Si l'annexion des pays Baltes par l'Empire Soviétique fut un fait historique incontournable, sa valeur face aux principes du droit international n'en demeure pas moins contestable. Forte de la place qu’elle tient au Conseil de sécurité de l'O.N.U., l'U.R.S.S. a pu se préserver des sanctions qui auraient du accompagner cet acte illégal. Seule là volonté farouche de Nations conscientes de leur identité a permit aux États Baltes de faire valoir leur droit à exister souverainement.
Le partage d'un butin
La signature du Pacte Germano-Soviétique, le 23 août 1939, par Ribbentrop et Molotov avait comme vocation principale la ratification d'un accord de non-agression entre deux puissances régionales dont nous savons ce qu'il adviendra Mais pour asseoir ce principe, il fallait définir les zones d'influence respectives sur une région où les signataires étaient en concurrence. Ce sera l'objet d'un protocole, tenu secret, abandonnant l'Estonie et la Lettonie aux Russes et la Lituanie aux Allemands. C'est seulement le 28 septembre 1939 que la soviétisation de cette dernière sera acquise. Une nouvelle convention sera signée : l'Allemagne cède ses « droits » sur la Lituanie contre une rançon de 7,5 millions de dollars-or. II faut rappeler que les républiques Baltes étaient alors souveraines. Seuls les représentants de ces États avaient compétence pour engager, ou limiter, leur souveraineté. De plus cet accord – de par son effet relatif inhérent à toute convention – n'est opposable aux États non signataires. Les soviétiques ne pouvaient donc s'appuyer sur ce traité pour porter atteinte à l'existence de ses voisins. Pour ne pas choquer les pudeurs du droit international des « nations civilisées » il leur fallait donner une façade honorable à une conquête déjà acquise dans son principe.
De la soviétisation au rattachement à l'U.R.S.S.
Fin 1939, les Russes, après avoir obtenu des Baltes un traité d'assistance mutuelle face à la « menace nazie », obtiennent la possibilité de stationner leurs troupes chez les cosignataires En juin 1940, prétextant d'incidents mineurs, l'U.R.S.S. envahit les trois républiques Baltes. En fait d'assistance, il s'agit d'un acte de guerre. Moscou dissout les parlements, fait élire des députés pro-russes. Le 21 juillet, la Diète Lituanienne demande son rattachement à l'U.R.S.S. ; la Lettonie et l'Estonie suivront le même simulacre. La régularité de tels actes n'est pas fondée. D'éventuels « incidents » entre alliés ne peuvent justifier une invasion et ne peuvent constituer de « casus-belli ». Quant à la responsabilité des différents parlements, elle est, évidement, non avenue. L'efficacité de ces actes n'en sera pas moins assurée par la violence de l'occupation des pays et le silence gêné des démocraties occidentales face à leur allié de la seconde guerre mondiale.
Vers une souveraineté recouvrée
Ne pouvant compter sur les vertus du Droit international, les Nations baltes, fortes de leurs identités, profitent de la Glasnost et des faiblesses dialectiques de l'Union pour affirmer une indépendance à laquelle elles n'ont jamais renoncé. Le 16 novembre 1988, le Soviet suprême estonien proclame sa souveraineté et prévoit une procédure de contrôle des lois et actes normatifs de l'U.R.S.S.. Le 18 mai 1989 le Soviet suprême lituanien proclame, à son tour, sa souveraineté, mais allant jusqu'à considérer expressément l'U.R.S.S. comme un état tiers. Le 28 juillet c'est à la Lettonie d’emboîter le pas. Commence alors un formidable « bras de fer » avec Gorbatchev, partagé entre la volonté des Russes à maintenir l'Union et la nécessité des ne pas déplaire aux occidentaux qui redécouvrent les républiques baltes. Le 7 février 1990, le Soviet suprême de Lituanie réaffirme sa souveraineté en déclarant illégale la déclaration d'entrée dans l'Union du 22 juillet 1940.
Cette volonté sera récompensée après l'échec du putsch des « complexes militaro-industriels » d'août 1991 et l'émergence d'un nouveau courant représenté par Boris Eltsine.
Marc LESALIEN
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