On trouvera ici, pour l'heure, les textes de Runes-Lettres d'O.D.I.N.
qui, à terme, seront complètés des réflexions du groupe de
travail de l'O.D.I.N.-76, de sa création jusqu'à sa dissolution en 1996.



vendredi

RUNES, Hiver 1991-92


Éditorial


... de Jean NAPOLEON

« Normands jusqu'à l'absurde »

La réunification de l'Allemagne, en train de s'accomplir et qui était inscrite dans le droit fil de l'Histoire, ou, si l'on préfère, dans le cours inéluctable des choses, m'a fait irrésistiblement penser à celle de la Normandie, qui, elle, attend toujours sa réalisation en dépit de l'évidente nécessité économique, politique et historique.

Les Allemands de l'Ouest et de l'Est disaient couramment, quand il y avait deux Allemagne : « Un seul peuple, deux États ». Nous pourrions dire à propos de notre patrie Normande : « Une seule province, deux régions ».

Les lecteurs habituels de cette revue, membres ou sympathisants de la Société Alfred Rossel, savent bien que, pour respecter leurs opinions politiques, philosophiques ou spirituelles, nous n'avons jamais publiquement pris parti pour telle ou telle thèse ou doctrine susceptible de nous diviser et que notre association ne prend jamais part à une manifestation de caractère politique.
Qu'il me soit néanmoins permis, sans choquer qui que ce soit et sans faillir à nos statuts, de proclamer notre « normandité » (le mot est de L. Sédar Senghor) et notre amour du pays qui nous a donné le jour, qui est celui de nos parents, ou que nous avons adopté pour nôtre.
Ne partageant pas l'outrance de Louis Beuve qui se voulait Normand avant d'être Français je ne saurais renier ma fierté d'être Français... en même temps que Normand. Il n'y a ni incompatibilité ni choix à faire. Par contre, je serais enclin à faire mienne l'affirmation d'Émile de La Bédollière selon laquelle « la Normandie est une Nation » si l'on donne à ce mot le sens de communauté humaine caractérisée par la conscience de son identité historique et culturelle. Oui, l'identité Normande existe, du Pays de Caux à l'Avranchin et de Cherbourg à Alençon. Elle n'est pas seulement dans les cœurs et les esprits. Elle est inscrite dans les mœurs et souvent sur le sol et contre cela le pragmatisme des politiques sera toujours inefficace. Elle découle de l'Histoire et cette identité Normande pourrait bien s'appeler « Unité ».
La personnalité Normande a été bâtie et façonnée par les Ducs successeurs de Rollon. Solide comme nos cathédrales – mais n'en ayant peut-être pas toujours eu la fierté, hélas ! – elle a défié les siècles et les tempêtes révolutionnaires ou guerrières. C'est pourquoi je suis pleinement d'accord avec le Mouvement normand qui lutte pour que les deux régions Normandes n'en fassent plus qu'une. Mais, dans nos cœurs l'Unité n'a jamais cessé d'exister. Plut au ciel qu'un jour prochain, en dépit d'oppositions aux motifs pas toujours avouables, elle se réalise dans les faits.
Certains technocrates ou aménageurs du territoire osent parler de « Grand Ouest » ou « d'Arc Atlantique », dans lequel serait imbriqué la « Basse » Normandie alors que la « Haute », elle, serait associée à la Picardie ou au Bassin de Paris. Ce serait l'horreur, la négation du « fait » Normand, alors qu'il serait si simple et naturel de reconstituer une véritable région Normande.
Nous sommes peut-être, aux yeux de ces gens-là de doux rêveurs irréalistes. Qu'importent pour eux l'Histoire et les sentiments ! Ernest Renan, qui n'était pourtant pas normand n'a-t-il pas écrit : « Les hommes de progrès sont ceux qui ont pour point de départ un respect profond du Passé » ?
Que ceux qui nous gouvernent s'inspirent de cela et qu'ils aillent dans le bon sens – celui de l'Histoire – afin que la Normandie profonde soit enfin une réalité : une Grande Normandie conforme à son passé comme â son destin...

« LE BOUES JAUN »
4ème série n°13 « SAINT DENIS » 1990

Hastings

Le 21 octobre, un petit noyau d'irréductibles s'était réuni à Rouen pour fêter le 925ème anniversaire de la bataille d'Hastings.

Bien plus que la conquête de la Grande Île, il convient de ne pas oublier que cet aboutissement est la conséquence d'une politique positive menée par notre Duc GUILLAUME qui sût, avec quel talent rétablir l'ordre dans sa Duché après une période de troubles violents durant sa minorité, mais aussi garantir ses frontières contre les multiples menaces dont faisaient l'objet ses domaines.
Que le souvenir des périodes fastes de notre histoire puisse servir d'exemple pour notre avenir.

Jean HALOT



HASTINGS

Si Hastings est une date prestigieuse pour l'histoire de la Normandie, il va sans dire qu'elle reste mémorable chez nos cousins d'Outre-Manche.

Nous ne résistons pas à donner la place à Mr R. Allen Brown sur ce sujet :
« Cette création (de la Duché de Normandie) fut celle d'un État, aux standards contemporains, la plus forte des principautés féodales, à l'intérieur desquelles la France, le royaume des Francs de l'Ouest, était alors divisée.
« Mais (la Normandie fut) aussi bouillonnante, unifiée, confiante et très consciente, dans les dernières décennies du onzième siècle, que le monde était « son huître ». À l'automne 1066, après avoir imposé leur suzeraineté ou leurs influences sur les contrés voisines du Maine et du Ponthieu, entièrement ou partiellement, sur celles de Bretagne et Boulogne, les Normands, ainsi que tout le monde les connaissait, avec leurs auxiliaires, avec leurs chevaliers et leurs montures, leurs archers et toute leur panoplie guerrière, naviguèrent pour conquérir le grand et lointain royaume d'Angleterre, au cours d'une de ces batailles décisives de l'histoire de l'Ouest ; ils combattirent près d’Hastings, un samedi 14 octobre. »
S'ensuit un long tableau, tout à l'honneur de nos ancêtres, ayant pour toile de fond l'univers connu des européens de l'an 1000, du Mur d'Adrien, au Sud de l’Écosse, jusqu’à la Principauté d'Antioche.
C'est avouer l'importance de cette Normandie « Conquérante » pour que son écho perdure encore.
Alors, Normands, n'y aurait-il plus que hors de Normandie que l'on sache chanter nos louanges ?

Jean-François BOLLENS

Betterave

Un triple ban pour la S.N.C.F. qui fait une campagne de promotion des Transports Express Régionaux (T.E.R.) et laisse croire, avec un manque de pudeur rarement consommé, que les T.E.R. Français sont comparables aux T.E.R. de province.

Alors que les lignes Normandes ne sont péniblement maintenues qu'avec les subventions des Conseils généraux... les lignes parisiennes bénéficient de tous les privilèges, et trouvent le moyen de s'en vanter !
Le « service public » ne manque pas de se T.E.R.

Les nains ça suffit !

Nous entendons souvent parler d'une France parisienne, centralisatrice, capitale autoritaire, au centre de régions en voie d'assimilation, d'uniformisation. C’est ainsi que l'on parle du peuple français. Comme si un Flamand était un Basque, ou, plus encore, un Francilien. La France gomme nos spécificités culturelles, ethniques, linguistiques ou religieuses. La dénonciation de cette France - là, c'est ce qui nous unit et nous -anime.

Mais il nous faut prendre garde. Beaucoup de jeunes Normands ont été éduqués dans le culte d'une communauté européenne. C'est un bel idéal. Nous avons pu rêver d'une Europe unie, chaudron dans lequel nous aurions versé les composants de notre future prospérité.
Hélas, cet idéal semble dévoyé. L'actuelle et future communauté entraîne notre perte.

Comment des États croupions comme le Luxembourg peuvent-ils avoir le même poids que la France ou l'Allemagne ? Comment se fait- il qu'un ministre luxembourgeois puisse ironiser sur les morts croates ?
Les petits caïds de la communauté dictent leur loi, inepte, alors que des régions plus puissantes, mais non souveraines, telles la Normandie, la Lombardie, ou la Saxe n'ont pas leur mot à dire.

Arrêtons la casse !
Bruxelles se comporte avec la C. E.E. comme avec un Empire. Les nains se sentent des velléités !
La politique européenne de Bruxelles est comparable à la politique jacobine de la France : même volonté d'uniformisation,
Un paysan du Schleswig-Holstein n'a rien de comparable avec un pâtre crétois ! *
A court terme, c'est la disparition du Bocage Normand, l'abattage du cheptel bovin au profit d'immenses champs de soja !

Laissez l'Europe aux spécialistes ! la centralisation, là encore, est catastrophique. Chaque région a ses traditions, ses produits. Les européens n'ont pas attendu les technocrates pour organiser leurs échanges économiques ou culturels.
Scénario catastrophe (mais réaliste) : le Maroilles est interdit. car il n'est pas conforme aux normes de goût de la C.E.E. .

A vos Yaourts !

Lev EFFELERGIS

* ou un banquier même luxembourgeois (n.d.l.r.)

Week-end en forêt de Brotonne

Les 16 et 17 novembre, Pierre Hensel – forestier notoire – a accueilli une dizaine de participants et leurs familles, pour une découverte « sur le terrain » de la forêt Normande.
Après une rapide présentation de la Forêt de Brotonne, une visite de différents sites permit d'illustrer les exposés que notre hôte commet mensuellement à Rouen. En fin de journée ; une discussion animée, autour de grillades et d'un pot amical, trouva son issue dans la définition d'un prochain numéro « Hors-série » de Runes, consacré à l'environnement, rural et forestier Normand.
Le lendemain nous conduisit sur les sites Gallo-romains de la Forêt de Brotonne : cimetière et villa furent l'objet d'une visite attentive. Un déjeuner « fin » prolongea la réunion jusqu'à l'heure de la séparation et nous nous promîmes un prochain rendez-vous.
Jean Halot

Betterave

Pour les Eurocrates qui avaient décidé de classer « hors-normes » européennes le ... Camembert au lait cru.

Ces nouvelles normes favorisaient l'éclosion d'un nouveau monopole où seules les grandes laiteries étaient capables de répondre aux nouvelles mesures d'asepsie. Au fait, le « camembert européen » aurait-il eu la même insipide saveur que les fades productions que le bon goût interdit d'appeler fromages ?

Curieuse façon de fêter le Bicentenaire d'une institution gastronomique, ou le centenaire de son appellation.

Napoléon III peut se rendormir,
Le coup passa si près ...

Histoire et mytologie

L’article auquel les lecteurs du numéro de Runes « États Baltes » ont échappé !

D'après Marija Gimbutas, les indo-européens arrivèrent en Europe vers le 4ème millénaire avant J.- C. et remplacèrent à l’ouest de l'Oural la civilisation de MARIOUPOL.

Cette confrontation entre finno-ougriens et proto-baltes, entre paysans ans et éleveurs, a du être une rencontre bouleversante entre deux manières de concevoir le monde. Les premiers vivant dans une société sans structure, auxquels on prête volontiers un culte collectif des morts, durent subir les assauts de nouveaux arrivants dont la vie sociale semble beaucoup plus élaborée : forte caste guerrière, panthéon hiérarchisé. Les proto-baltes, associés aux premiers indo-européens, développèrent la civilisation des tertres (KURGAN en russe) où étaient vénérées des divinités de troisième rang, les jumeaux ASVIN.

Des parallèles amusantes pourraient être tentées, le terrain s'y prête trop, mais nous nous garderons d'en tirer des conclusions définitives, car elles ne s'appuieraient que dé constats « archéologiques ».

Les Balles sont des agriculteurs dont l'histoire nous a laissé peu de traces. Le paganisme ayant longtemps résisté à la pénétration chrétienne nous savons néanmoins que ces anciens européens n’avaient pas construit de temples, mais pratiquaient des offrandes ou des sacrifices à des fins divinatoires ou offraient des banquets. Les « forets-mères » étaient sacrées et ils adoraient le feu sous la forme d'un culte en l'honneur du marteau qui forgea le soleil, l'arc en ciel était divin. Pour ceux qui se sont intéressé aux croyances des scandinaves avant le christianisme les ressemblances sont troublantes. Mais si l'on y ajoute que ces anciens baltes croyaient à la transmigration des âmes, ces dernières prenant partiellement la forme d'ours ou de loups, partiellement celle de dieux, que le Destin devait être vécu de façon active et non subie pour ne pas devoir en affronter les rigueurs, nous aurons, sous une forme simplifiée, retrouvé une parenté entre la foi des Baltes et celle des Scandinaves.

En rapprochant ces croyances assez rustiques de ce que nous savons des croyances des anciens scandinaves, nous pourrions déceler des tracés de la rencontre entre les Vannes, divinités anciennes et de second ordre chez les Scandinaves, et les Ases-Asvin plus à la ressemblance des aspirations indo-européennes, dont les Eddas nous rapportent le récit des affrontements avant que les divinités réorganisent leurs règles sociales, idéalisation des vécus du monde du milieu.
Sur ces bases, on révisera accessoirement l'opinion occidentale sur la présence des Hongrois en Europe. L'idée couramment admise présume que les Hongrois seraient les descendants des Huns dont le chef Attila a été trop longtemps dépeint comme un petit homme, fortement typé asiatique au teint « jaune » et aux cheveux noirs et huileux. L'appartenance du Hongrois aux langues finno-ougriennes récuse cet apriori et nous oblige à une révision de nos « connaissances » scolaires : Attila loin d'être un envahisseur serait un vieil européen qui défendait, à défaut d’un territoire toujours à reconquérir, son peuple contre des indo-européens. Le poème eddique mineur « La chanson du combat des Huns », décrit minutieusement le différent sur héritage entre un roi Got et un prince hunnique lequel regroupa « cinq tribus de cinq mille, composées de treize centuries de quatre cents personnes », soit 130000 personnes. Le premier témoignage de la poésie épique scandinave admet, malgré son issue, une revendication hunnique « légitime » sur les forets (sacrées), le tombeau des rois (lieu de culte national) et le centre de l’assemblée (alđing) dans les termes des symboles juridiques de la royauté telle qu'elle semblait admise à l’époque. Dans ce contexte Atlakvida pourrait prendre la correspondance symbolique d'un Vercingétorix ante-européen.

Et si, pour conclure, cette lecture assez libre de quelques données archéologiques et mythologiques, plus qu'une fantaisie, était un innocent clin d'œil que nous adressaient nos lointains ancêtres

François DELAUNAY.

mardi

RUNES Hors-série n°1



ÉDITORIAL

... de Jacques TRICOT

«Les Baltes, et tout particulièrement les Estoniens et les Lettons sont des Normands ; et ce que vous ne savez sans doute pas, c'est qu'ils en sont particulièrement conscients. Tallinn, cela veut dire « la ville des Danois » et ce n'est pas un hasard, quand j'en ai parlé au ministre estonien de la culture, le compositeur Lepo Sumera, (s')il s'est montré tout à fait d'accord...

Les Normands dorment-ils ?
La Normandie est-elle définitivement plongée dans une sorte de léthargie ?
On pourrait le croire…

Les Normands, qui se proclament avec fierté « sire de seï », sont-ils devenus de vagues sujets, tout juste bons à être colonisés par l'administration de la puissance occupante ?

À l'heure où tes Lituaniens n'hésitent pas à dire à Mikhaïl Sergueivitch Gorbatchev ce qu'ils pensent de la colonisation russe, et envoient au Soviet suprême des députés qui n'hésitent pas à mettre les pieds dans le plat sans aucune gène ni hésitation, les Normands se contentent de déléguer à la soi-disant « assemblée nationale » un ramassis de « béni-oui-oui », dont on attend encore qu'ils élèvent quelque peu la voix pour défendre, ne fut-ce que timidement les intérêts de leur pays.

Les Pays Baltes ont réussi à ne pas être russifiés, ni par les Tzars, ni même par Staline qui ne lésinait pourtant pas sur les moyens, alors que les Normands s'en trouvent réduits à quémander aux technocrates snobinards parisiens le droit d'être eux-mêmes.

Les Pays Baltes ne sont pas un sujet qui peut nous intéresser de loin, mais bien au contraire, être au premier plan de nos activités. »

« UNITÉ NORMANDE n° 142- 01:1991 »
« UNITÉ NORMANDE n° 144- 03:1991 »

DAVANTAGE DE CULTURE !
DAVANTAGE DE CULTURE EUROPÉENNE
SOYONS DES ESTONNIENS, MAIS DEVENONS AUSSI DES EUROPEENS !
Gustav SUITS

Remarques liminaires à l'histoire des peuples Baltes

Reportons-nous, si vous le voulez bien, en Europe, entre 6500, et 3800 av. J.-C.. Sur leurs terres isolées du mouvement néolithique, dans les plaines péri baltiques, polonaises ou russes, les mésolithiques poursuivent leur vie traditionnelle : pêche, cueillette, petit artisanat, activités compatibles avec les déplacements fréquents… Le jardin d'Éden. Nos bons hommes, ainsi que leurs familles vivent une société de loisirs, deux ou trois heures de travail quotidien suffisent à satisfaire leurs besoins élémentaires. Vision qui pourrait susciter bien des regrets chez les inconditionnels du retour à. la nature, si leur aire de dispersion n'avait été envahie, vers -5 800.
C'est vers cette période que, depuis le Danemark jusqu'en Silésie, apparut un peuple nouveau, dont nous gardons la trace par ses sépultures individuelles où se retrouvent des gobelets à col en entonnoir. Ce peuple qui a des affinités avec le groupe sud-ukrainien d'lgren, jouera par la suite en Allemagne du Nord et au Danemark un rôle considérable. Dans leurs premiers dolmens on trouvera des gobelets, puis les dolmens se compliqueront de couloirs pour aboutir à. des constructions comme celle de Stonehenge. On reconnaitra par la suite de plus belles poteries et de magnifiques armes de silex qui se révèlent, sans que l'on puisse s'expliquer comment, sans aucune influence occidentale au méridionale...
Au cours de la seconde moitié de ce néolithique « moyen », donc à peu près en même temps que se développe cette civilisation de bâtisseurs de dolmens, et comme rien n'est simple déjà, malgré l'époque, la civilisation locale ressurgît des profondeurs de son mésolithique. Ces «sauvages » avaient tout simplement continué de vivre en marge du « progrès » ; ce type de comportement n'est pas exceptionnel puisqu'il a déjà été constaté que certaines sociétés, « ilots rétrogrades », refusaient le cuivre alors que tous ceux qui les entouraient en avait adopté la pratique. Des mésolithiques, donc, ressurgissent dans le domaine péri-baltique, (dwelling place culture) et pratiquent la chasse et la pêche au milieu d'autres groupes réputées plus évolués.
L'Allemagne de l'Ouest constitue, de son côté, un dangereux champ de bataille où s'affrontent les hommes des allées couvertes et ceux qui ensevelissent leurs morts dans des caissons à campaniformes, repoussés, les uns et les autres, par d'autres peuplades qui pratiquent la céramique cordée, que l’on croit reconnaître comme indo-européennes, et enterrent leurs morts dans des sépultures individuelles, mais sous tumulus (civilisation dite de KURGAN).
Malgré toutes ces différences, la société néolithique est une société fondamentalement agricole, organisée autour de villages, où l'on pratique l'essartage sur les forêts environnantes. Ces sociétés, réputées égalitaires et peu hiérarchisées, sont remarquables pour leur absence de préoccupations militaires : l'espace ne semble manquer pour personne, et il faudra vivre à la fin du néolithique pour que succèdent au culte des fontaines, des roches, des ancêtres ou du soleil, des habitations vastes, temples ou palais, que se construisent des tombes princières où s'entasseront pêle-mêle la dépouille du guerrier, ses armes, parfois les siens; le plus souvent victimes de mort violente.
Aux langues finno-ougriennes attribuées au néolithique, succéderont, vers -4500 -3800, les indo-européennes infiltrées en Europe par l'Ukraine, représentées par le chalcolithique.
Les grands cro-magnoïdes du mésolithique, qualifiés de proto-europoïdes ou proto-nordiques, sembleront remplacés par de nouveaux occupants, sauf au Nord de l'Europe, mais ressurgiront à la fin du néolithique au Danemark et en Suède, puis gagneront les régions Rhin-Danube, les îles Britanniques, la Bohème-Moravie, le Rhône.
Pour le peu de traces qu'elles nous fournissent, on peut malgré tout imaginer que les vieilles civilisations, oubliées par les migrations, se sont consolidées à l'écart de l'intérêt des nouvelles et que, discrètement, elles ont su prendre un véritable essor démographique. Toutes les ethnies européennes actuelles se sont trouvées formées dés le chalcolithique, et seule leur répartition géographique a varié sensiblement par la suite.
François DELAUNAY.


Les Baltes premiers européens d'Europe ?


La plupart des langues européennes, à l'exception des langues finno-ougriennes : basque, hongrois, lapon, finnois et estonien, présentent entre elles, tant dans leur grammaire que dans vocabulaire, des correspondances si évidentes et si nombreuses qu'il n'est possible de les expliquer que par une origine commune, en l'occurrence indo-européenne.

L'étude sémantique de ces similitudes peut être appliquée avec succès à l'identification et à l'analyse d'autres familles linguistiques : sémitique, bantou, altaïque et cetera... l'ensemble de ces études ouvre la voie de la paléo-linguistique.

Si les Baltes, dont la présence en Europe est attestée depuis le second millénaire avant J.-C., semblent faire figure de « grands ancêtres » de la famille des langues indo-européenne, leurs voisins finno-ougriens représentent une civilisation plus vieille d'un millénaire, contemporaine et voisine de celle qui éleva les menhirs et dressa les dolmens. Les langues finno-ougriennes actuellement reconnues étant le suomi, le carélien, l'este et le hongrois, on constatera, premièrement, que les Pays Baltes n'ont ni unité ethnique, ni linguistique puisque l'Estonie appartient à un groupe autre que le letton et le lituanien apparentés au groupe balte dérivant de l'indo-européen ; secondairement, que si les histoires respectives sont parallèles les caractères restent distincts, les réactions face aux évènements nous paraissent similaires et que c'est ailleurs qu'il faudra aller chercher les raisons de l'apparent « front commun » pour la survie des « Pays Baltes ».

Le groupe indo-européen des langues « germaniques » comportant trois subdivisions, l'orientale – gotique – la septentrionale – islandais, norvégien, suédois, danois – et occidentale – haut et bas allemand, frison, anglais – succéda plus tard sur les territoires de l'Europe centrale aux précédents occupants qui furent rejetés sur les périphéries. Ces mouvements qui sont le fond de notre histoire européenne au moyen-âge en expliquent d'autres plus récents : tensions ou éclatements contemporains abondent, que nombre de commentateurs cherchent à nier en imposant un postulat uniquement économique. Bien que nous soyons plus sensibles aux faits qui se sont déroulés à l'Ouest de notre continent, l'exemple Balte est riche d'enseignements pour ceux qui prendront la peine de s'y attacher. C'est au travers d'un filtre « exotique », sur des bases, sinon identiques, trop proches dans la durée et par le tempérament des hommes, une manière exemplaire de poser un regard neuf sur nos origines, notre passé et notre devenir européen.

Par ce fil conducteur, puissions-nous être en mesure, sereinement, de réviser nos aprioris quant à nos relations, en qualité de Normands, vis à vis de la France ou de l'Europe.


O.D.i.N-76

Une simple histoire de Baltes

Bien que l'histoire proprement dite des pays Baltes ne commence qu'au XIIème siècle, avant cette période existe une documentation, assez pauvre et essentiellement archéologique.
La différence des états Baltes repose essentiellement sur la linguistique où deux groupes prédominent :
– les finno-ougriens, composés des Lives du Golfe de RIGA, les Ingriens du lac Peïpou et les Estes du golfe de Finlande dont le peuplement se situe au début de l'ère chrétienne. Cependant le caractère primitif des Estes et des Lives – pauvreté du vocabulaire et absence d'organisation politique – a entraîné le remplacement des tribus finno-ougriennes les plus méridionales par les Baltes.
– les Baltes représentés par trois rameaux indo-européen :
Les Prussiens ; les Lettes, Coures, Sémigalliens et Letgalliens ; les Lituaniens.
Leur présence est plus ancienne puisqu'elle est attestée au second millénaire avant J.-C., ce qui fait des Baltes l'un des premiers peuples européens connus.
Loin de Rome, le commerce crée l'histoire. Les connaissances romaines sont pratiquement nulles, les AESTI, dont parle Tacite, ne désigne que l'ensemble des peuples vivant à. l'Est de la Germanie.
TALLINN: (Estonie) La ville doit son nom « ville danoise » à la conquête, en 1219 par le roi du Danemark, Valdemar II, d'une ancienne forteresse surveillant un port dont le destin allait se confondre avec celui de la Hanse jusqu'à ce que la cité commerçante adopte la religion Réformée et se place, en 1561, sous la protection de la Suède. Arrachée en 1710 par Pierre le Grand qui y fonde un port de guerre, Tallin devient une sorte d`avant port de Saint-Pétersbourg, se substituant à ce dernier lorsque la glace interdit l’accès des bouches de la Neva.
Les scandinaves dès le VIIème siècle, créent une thalassocratie, puis évangélisent le pays des Lettons, sur le fleuve DVINA, inaugurent un développement économique précoce. Au IXème siècle les liens commerciaux avec les Ostrogoths sont renouvelés avec les Varègues qui étendent leurs relations jusqu'à BYZANCE et BAGDAD.
Malgré tout au XIème siècle le pays Letton est encore à l'âge du fer et se compose d'une demi-douzaine de principautés où le catholicisme pénètre lentement jusqu'au XIIIème siècle. S'organisent alors des croisades et des colonisations qui sont autant d'entreprises politiques et militaires.
La poussée allemande correspond à l’expansion économique et maritime de la HANSE. En 1201 Albert de BUXHÖVDEN crée RIGA et y Installe des bourgeois de BREME. En 1204, il crée l'ordre du PORTE-GLAIVE : la Foi est imposée par l'occupation et provoque des soulèvements comme celui de l'île d'Oesel qui sera écrasé avec l'appui du roi de Danemark.
RIGA : (Lettonie) Fondée en 1201 par Albert de Buxhövden, d' abord port hanséatique avant de devenir avec Tallin et Vyborg une des villes fortes interdisant l'accès de la Baltique aux Russes. Enlevée par les troupes de Pierre le Grand en 1721, la ville vit son commerce décliner du fait de la concurrence avec Saint-Pétersbourg et de sa situation de ville frontière avec la Pologne.
Le PORTE GLAIVE voit sa progression vers l'Est stoppée en 1242 Par Alexandre NEVSKY au lac Peïpous (Eisenstein fait une erreur communément admise en décrivant les TEUTONIQUES).
Le développement du commerce enrichit les villes qui sont, de fait, des principautés allemandes mais ruine les propriétaires ruraux ; on assiste à un transfert des terres au profit d'une nouvelle aristocratiques bourgeoise de colonisation.
Les lituaniens résistent aux TEUTONIQUES, au XIIeme siècle, Mindogas, chef des tribus païennes, profitant de l'instabilité des principautés progresse à l'Est. Ses successeurs, convertis au catholicisme, seront, au XIVème siècle, à la tête d'une fédération de peuples à majorité ruthène et orthodoxe dont les territoires iront jusqu'à la Mer Noire. En 1386, l'un d'eux, Jodaïla, épouse Edwige héritière du roi de Pologne et le Grand Duché de Lituanie atteindra son apogée au XVème siècle à TANNENBERG (1409) en repoussant l'Empereur et les Teutoniques.
PORTE GLAIVE : créé en 1202 par Albert de Buxhövden, évêque de Livonie. Celui-ci venait de fonder la ville de Riga et institua cet ordre pour évangéliser la Livonie alors païenne. L'ordre du fusionner avec les Teutoniques en 1234. En 1525 le grand maître de l'Ordre Teutonique opta pour la Réforme ce qui entraîna là recréation du Porte Glaive qui se maintint jusqu'en 1561.
Le XVIème siècle voit la prépondérance polonaise, mais la majorité des lituaniens est restée païenne, et beaucoup de nobles lituaniens se tournent vers le Tzar. Devant ce danger le traité d'union de LUBLIN, en 1569, marquera la fusion de la Pologne et de la Lituanie.
La Réforme touche les villes, en 1587, un livre de psaumes est rédigé en letton. La Contre-réforme utilisera les langues lettonne et lituanienne dans ses collèges et à l'université de Vilnius. Paradoxalement allemands, suédois et polonais sont à l'origine de la littérature écrite Balte.
Les suédois maintiennent leur domination sur l'Estonie et la Livonie, en 1662 ils fondent l'université de TARTU. Mais la rigueur de cette suzeraineté entraîne la réaction des barons baltes attachés à leurs privilèges exorbitants. En 1709, lorsque le Tzar envahit la Livonie il sera accueilli par la noblesse locale comme un libérateur.
Les droits des barons sont rétablis ce qui provoque l'exaspération des paysans, à tel point que HERDER et MERKEL – philosophes allemands – découvrent le nationalisme au travers du problème social Balte.
La révolution libérale russe de 1830 accélère le réveil national Balte. La révolte lituanienne reste cependant le fait de la noblesse, de la bourgeoisie et du clergé « polonisés ». La répression s'attachera donc à « dépoloniser » le pays mais renforcera le sentiment de triomphe du nationalisme lituanien, malgré la fermeture de l'université de Vilnius.
En Estonie et en Lettonie le pangermanisme des barons entraîne la russification de Taitu.
Au début du XXeme siècle la russification devient une manifestation d'hégémonisme orthodoxe.
L'essor industriel cause l'exode rural, l'arrivée des populations dans les villes favorise le développement du nationalisme : Riga devient lettonne. La révolution russe de 1905 permet la renaissance littéraire Balte.
Après l'invasion allemande de 1915, le traité de Brest-Litovsk, en 1917, consacre l'occupation des Pays Baltes, mais les projets allemands soulèvent l'opinion internationale. Lorsqu'au lendemain de l'armistice le général van der Goltz commettra un coup d'État contre le gouvernement Letton et, en bombardant Riga, la résistance des Baltes sera redoublée.
En 1920 les États Baltes sont reconnus de facto. Mais le flux et le reflux des armées allemandes et soviétiques, le départ des capitaux russes provoquent l'anéantissement de la vie industrielle et commerciale,
Une alliance lituano-russe est constituée pour récupérer Vilnius, mais la conférence internationale de 1923 confirme les frontières de 1920. L'instabilité ministérielle et la lutte contre le bolchévisme conduisent en 1926 à la dictature ; la réorganisation sociale et économique s'appuie sur la réforme agraire et le morcellement des grandes propriétés.
MEMEL : (Lituanie) L'histoire de la ville et du territoire de Memel est étroitement liée à celle du flux et du reflux du germanisme dans les Pays Baltes. Fondée en 1252 par les chevaliers du Porte Glaive, sous le nom de Neu Dortmund, érigée en ville en 1254, Memel devient possession de l'évêque de Courlande ; en 1328, elle passe au domaine de l’Ordre Teutonique. Devenue, de ce fait, prussienne, elle le restera jusqu'au 10 septembre 1920.
Fin 1938, le IIIème Reich pose le problème du rattachement de MEMEL alors sous administration lituanienne. Pour preuve de leur neutralité les trois États Baltes signent en 1939 un pacte de non-agression avec l'Allemagne Mais la signature, dès août 1939, du pacte germano-soviétique livre les trois États à l'U.R.S.S.. Cette dernière leur imposera, devant le danger nazi, en 1940, un traité laissant le champ libre à la résidence de ses troupes. Le 21 juillet 1940 les parlements, hâtivement élus, où dominent les communistes, décident la soviétisation et le rattachement des trois pays à l’Union ; commencera alors la liquidation physique des opposants, exécutions, déportations, pillages massifs qui ne seront interrompus que par l'arrivée des allemands en juin 1941.
Des gouvernements provisoires sont formés, mais l'échec de la politique de collaboration et l'organisation de la résistance conduisent au rattachement des Pays Baltes à la Biélorussie sous le nom d'« Ostaland ». La progression des armées soviétiques à partir de 1944 rétablit le statut politique de 1940 dans les trois pays.
La Lituanie, la Lettonie, l’Estonie forment les 16e, 17e et 18e Républiques Soviétiques Socialistes de l'Union.
D'après la constitution soviétique, chaque république jouit de son autonomie politique et culturelle ; en Lituanie, en 1945, cinq commissaires sur onze étaient russes sous des noms lituaniens. En réalité le Parti Communiste, dont les cadres supérieurs sont russes, contrôle toute la vie politique, économique et culturelle du pays.
La « dékoulakisation », ou démantèlement des propriétés, conduit à la prolétarisation des campagnes, la résistance à la russification et à la collectivisation provoque la fuite de la main d’œuvre ; l'élimination des réactionnaires et des nationalistes laisse apparaître un plan de dépopulation et d'anéantissement du nationalisme Balte ; déportation massive et installation de colons soviétiques, emploi du russe comme langue officielle et lutte antireligieuse.
Jean-François BOLLENS

Les Baltes, Normands de la Baltique


Les Baltes viennent de recouvrer leur indépendance enfin reconnue par l'O.N.U..



Mais, pour des « raisons d'État », la plupart des États occidentaux ont repoussé cette échéance, fatale pour leur intérêts, donc leurs idéaux. Les U.S.A. ont tardé pour ménager une U.R.S.S. que tout le monde savait condamnée à l'éclatement. Le Royaume-Uni a même donné « l'or des Baltes » à l'U.R.S.S. voici plusieurs années, au moment du remboursement de l'emprunt russe. Si la France a conservé l’or que les Baltes lui avaient confié en 1939, – elle l'a d'ailleurs restitué voici quelques semaines – le gouvernement Chirac avait fait raser les locaux diplomatiques lituaniens à Paris en 1974.
Si la plupart des États européens se sont montré d'abord réservés quant à cette indépendance, cette inertie diplomatique ne fut pas générale. En 1990, l'Islande fut la première à reconnaître l'indépendance de la Lituanie, elle fut ensuite confortée par le Danemark, puis l'Allemagne, membres de la C.E.E..
Pourtant, alors que l'État jacobin français se montrait timoré, tant sur les raisons de l'indépendance balte, que sur les chances de Gorbatchev de se maintenir à la tête de l'U.R.S.S., des encouragements se faisaient entendre. C'est le cas du Festival du Cinéma Nordique, qui s'est tenu à Rouen, en 1990, où la Lituanie fut invitée. Son drapeau a flotté dans les rues de la capitale Normande.
La Normandie, alors que les pays baltes s'agitaient, a fait entendre sa voix, une voix originale, différente de celle du soi disant « peuple français ».
Et ce n'est pas par hasard, nostalgie de l'appartenance ethnique, culturelle et historique au monde nordique, les normands ont spontanément pris fait et cause pour ces peuples baltes, catholiques ou évangéliques, luthériens, teutons, finnois, scandinaves, voire polonais, que sont l'Estonie, là Lettonie et la Lituanie.
Il existe de nombreuses analogies entre les pays Baltes et la Normandie : bâtards isolés du monde nordique, soumis à l'influence d'autres civilisations, légères différences ethniques, dialectales...
Les Normands doivent, s'ils veulent préserver le peu d'originalité qu'il leur reste, s'inspirer de l'exemple Balte. Comment, par exemple, face à l'uniformisation d'un pouvoir central, un peuple peut faire entendre sa voix, démocratiquement, lors d'élections, alors qu'il est devenu minoritaire sur son propre sol ? Si la Lettonie est majoritairement peuplée de Slaves, la Normandie est maintenant majoritairement peuplée d'horsains.
Cependant, la Lettonie a remporté son bras de fer face à Moscou.
Pourquoi les Normands seraient-ils incapables de se faire entendre ?
Normand ! Sois toi-même.
Refuse l'assimilation au modèle culturel français.
Redécouvre l'identité Normande !
Lev EFELLERGIS

Cinquante ans de luttes

Si l'annexion des pays Baltes par l'Empire Soviétique fut un fait historique incontournable, sa valeur face aux principes du droit international n'en demeure pas moins contestable. Forte de la place qu’elle tient au Conseil de sécurité de l'O.N.U., l'U.R.S.S. a pu se préserver des sanctions qui auraient du accompagner cet acte illégal. Seule là volonté farouche de Nations conscientes de leur identité a permit aux États Baltes de faire valoir leur droit à exister souverainement.
Le partage d'un butin
La signature du Pacte Germano-Soviétique, le 23 août 1939, par Ribbentrop et Molotov avait comme vocation principale la ratification d'un accord de non-agression entre deux puissances régionales dont nous savons ce qu'il adviendra Mais pour asseoir ce principe, il fallait définir les zones d'influence respectives sur une région où les signataires étaient en concurrence. Ce sera l'objet d'un protocole, tenu secret, abandonnant l'Estonie et la Lettonie aux Russes et la Lituanie aux Allemands. C'est seulement le 28 septembre 1939 que la soviétisation de cette dernière sera acquise. Une nouvelle convention sera signée : l'Allemagne cède ses « droits » sur la Lituanie contre une rançon de 7,5 millions de dollars-or. II faut rappeler que les républiques Baltes étaient alors souveraines. Seuls les représentants de ces États avaient compétence pour engager, ou limiter, leur souveraineté. De plus cet accord – de par son effet relatif inhérent à toute convention – n'est opposable aux États non signataires. Les soviétiques ne pouvaient donc s'appuyer sur ce traité pour porter atteinte à l'existence de ses voisins. Pour ne pas choquer les pudeurs du droit international des « nations civilisées » il leur fallait donner une façade honorable à une conquête déjà acquise dans son principe.
De la soviétisation au rattachement à l'U.R.S.S.
Fin 1939, les Russes, après avoir obtenu des Baltes un traité d'assistance mutuelle face à la « menace nazie », obtiennent la possibilité de stationner leurs troupes chez les cosignataires En juin 1940, prétextant d'incidents mineurs, l'U.R.S.S. envahit les trois républiques Baltes. En fait d'assistance, il s'agit d'un acte de guerre. Moscou dissout les parlements, fait élire des députés pro-russes. Le 21 juillet, la Diète Lituanienne demande son rattachement à l'U.R.S.S. ; la Lettonie et l'Estonie suivront le même simulacre. La régularité de tels actes n'est pas fondée. D'éventuels « incidents » entre alliés ne peuvent justifier une invasion et ne peuvent constituer de « casus-belli ». Quant à la responsabilité des différents parlements, elle est, évidement, non avenue. L'efficacité de ces actes n'en sera pas moins assurée par la violence de l'occupation des pays et le silence gêné des démocraties occidentales face à leur allié de la seconde guerre mondiale.
Vers une souveraineté recouvrée
Ne pouvant compter sur les vertus du Droit international, les Nations baltes, fortes de leurs identités, profitent de la Glasnost et des faiblesses dialectiques de l'Union pour affirmer une indépendance à laquelle elles n'ont jamais renoncé. Le 16 novembre 1988, le Soviet suprême estonien proclame sa souveraineté et prévoit une procédure de contrôle des lois et actes normatifs de l'U.R.S.S.. Le 18 mai 1989 le Soviet suprême lituanien proclame, à son tour, sa souveraineté, mais allant jusqu'à considérer expressément l'U.R.S.S. comme un état tiers. Le 28 juillet c'est à la Lettonie d’emboîter le pas. Commence alors un formidable « bras de fer » avec Gorbatchev, partagé entre la volonté des Russes à maintenir l'Union et la nécessité des ne pas déplaire aux occidentaux qui redécouvrent les républiques baltes. Le 7 février 1990, le Soviet suprême de Lituanie réaffirme sa souveraineté en déclarant illégale la déclaration d'entrée dans l'Union du 22 juillet 1940.
Cette volonté sera récompensée après l'échec du putsch des « complexes militaro-industriels » d'août 1991 et l'émergence d'un nouveau courant représenté par Boris Eltsine.
Marc LESALIEN

Les littératures Baltes

LITUANIE



Dans la grande principauté de Lituanie, qui s'étendait aux XIV et XVème siècles de la Baltique à la Mer Noire, la langue officielle était le biélorussien, et plus tard le latin. Au XVIème siècle, l’établissement temporaire du protestantisme et ensuite de la Contre-réforme ont amené les auteurs d'œuvres religieuses à s'exprimer en langue vernaculaire.



A côté d'une poésie populaire, dite de servage (celui-ci ne fut aboli qu'en 1861), et qui demeura orale, la littérature écrite ne comporte jusqu'en 1700 que des écrits religieux.
L'élan de libération nationale et sociale déclenché dans la seconde partie du XIXème siècle suscite une vague d'écrivains engagés dont témoigne l'œuvre du poète romantique Mairouis où se déploie l'ensemble des thèmes qu'il porta à leur maximum d'expression.
Après l'indépendance en 1918, les mouvements d'avant garde de l'étranger influencèrent les lettres lituaniennes qui les assumèrent sans infléchir pour cela le génie national. Jusqu'à nos jours, la veine lyrique garde la primauté, ainsi qu'en témoigne le poète lituanien d'expression française Oscar MILOSZ.

 

LETTONIE



Après une exubérante floraison de chants populaires, la domination allemande qui s'étend sur la Lettonie au XIIIème siècle, la conversion et la germanisation des habitants empêchèrent l'évolution normale de la littérature â partir de ce tuf initial.



Il s'en suivit que la littérature lettonne ultérieure, qui demeura pratiquement orale jusqu'au XIXème siècle, apparaît comme une tentative de pallier cette rupture et de rétablir une continuité avec les traditions et le folklore qui étaient ceux des premiers lettons.
Au XIXème siècle, le « réveil national » suscita des œuvres qui, tout en s'inspirant des sources populaires anciennes, abordèrent des thèmes nouveaux. Après 1850, les écrivains, issus bien souvent des campagnes, s'attachèrent, principalement dans le conte et dans le roman, à décrire la paysannerie : réalisme rustique où l’exigence morale du luthéranisme dominait. Dans les deux dernières décennies, fidèle au réveil national, l'intelligentsia lettonne opposa une vive résistance à la russification du pays entreprise par Alexandre II. Si les changements accélérés que connaissait la société orientèrent alors beaucoup d'auteurs vers un nationalisme puisé aux écoles française et russe, expression de leur adhésion aux idées nouvelles du socialisme, d'autres cependant, davantage poètes, se faisaient les promoteurs des mouvements impressionnistes et symbolistes.
De cette polyphonie littéraire naquit une génération d'écrivains qui régnèrent dans les lettres à partir de l'indépendance de 1918.
Après la seconde guerre mondiale, un certain nombre d'auteurs émigrèrent et inaugurèrent en exil une nouvelle source de création lettonne.

ESTONIE



Si en Estonie, la tradition de la poésie populaire, restée vivante jusqu'à, nos jours, remonte à l'âge du fer et des vikings, les premiers ouvrages imprimés en estonien ne datent que du XVIème siècle.



La littérature estonienne est celle d'une nation d'un million de personnes, parlant une langue finno-ougrienne proche du finnois et incluse tour à tour dans les aires d'expansion des mondes scandinave, allemand et russe. La littérature écrite estonienne ne date que du XIXème siècle, mais son éclosion fut facilitée par l'existence d'une tradition orale d'une exceptionnelle richesse, ainsi que par la fixation d'une langue de référence, celle de la Bible. Les tentatives de russification à la fin du XIXème siècle, ainsi que la réaction qui suivit les événements de 1905 n'empêchèrent pas les écrivains estoniens de se mettre à. l'écoute de l'Europe et de trouver en Finlande un modèle à leurs aspirations. Conséquence de la première guerre mondiale et de la Révolution Russe, l'accession du pays à l'indépendance ouvre un véritable âge d'or des lettres estoniennes, mais la montée des totalitarismes, l'occupation puis l'annexion par l'U.R.S.S., l'occupation allemande et la perte définitive de l'indépendance contraignent finalement à l'exil la très grande majorité des écrivains qui, après l'automne 1944, poursuit son activité à l'étranger. Le renouveau littéraire, qui a suivi en Estonie la fin de la période stalinienne, témoigne pourtant de la vitalité d'un peuple de haute culture, dont il faut regretter que son isolement linguistique et les vicissitudes de son histoire ne lui aient pas encore permis de mieux faire entendre sa voix.

samedi

RUNES Automne 1991




Éditorial
... de Jean MABIRE

Toi qui nous lis, toi qui n'aime pas ce vilain papier, cette présentation de misère, toi qui ne comprends pas tout ce vocabulaire nouveau.
Camarade à qui on a si peu ou si mal parlé du pays de tes pères, à qui on n'a jamais raconté la vie de ceux qui labourèrent nos champs et bâtirent nos villes, à qui on n'a jamais montré la mer d’où sont venus les hommes du Nord.
Toi qui es seul dans ton « coin de province » dans ton « trou de campagne », toi qui ne retrouves plus ton chemin dans les ruines de ta ville ou dans le désarroi de tes croyances.
Mais qui veux quand même agir, qui veux quand même espérer – camarade qui veux rester « jeune » au milieu de tout ce monde de petits vieux
Toi qui t’accroches et qui en emmènes d'autres : frères, camarades, copains des auberges, garçons et filles des groupes folkloriques ...
Toi qui sais encore sourire et qui crois à cette force merveilleuse de notre âge. Viens avec nous –
Écris à « Vikings » – Assure la diffusion du journal. Groupe des camarades autour de toi. Fais des abonnés. Envoie-nous des suggestions et des articles. Critique-nous si tu n'es pas d'accord. Mais ne dors plus camarade, ne reste plus tout seul dans ton coin, les mains dans les poches.
C'est par un grand courant d'amitié et par une volonté farouche que nous pourrons redonner à la jeunesse de Normandie la foi et la confiante qui lui manquent
Ne trouves-tu pas cette aventure magnifique ? Nous partons à la découverte, mais c'est nous-mêmes, c'est notre propre pays qu'il nous faut découvrir. Mais non pas isolés, le dos tourné à tous ces jeunes qui cherchent aussi, la main fermée à tous ces garçons et à toutes ces filles que rien ne distingue de nous à travers la France, à travers la vieille Europe.
Mais comme te dit le chant de route « la main dans la main ».
Camarade viens avec nous, viens allumer des feux, viens chanter, viens vivre. Embarque-toi pour un immense voyage.
Sois un des premiers du premier « drakkar ».
« VIKING n°1 – 1949 »
« SI TU ES QUELQU'UN DE MA RACE
IL FAUT QUE TU PRENNES EN MAIN MA CAUSE ... »
Chant populaire danois.

Rollon

L'O.D.I.N.-76 REND HOMMAGE A ROLLON

Le 21 septembre à l’ombre de l’abbatiale SAINT OUEN de ROUEN, l'O.D.I.N. commémorait la fondation de la Normandie, à l'automne 911, par HRÔLFR le MARCHEUR, chef viking. Devant un public intéresse et sympathique, la cérémonie débuta par un discours du président de l'O.D.I.N., J.-F. BOLLENS : la saga de ROLF inaugura l’épopée Normande, Le dépôt d'une gerbe aux couleurs du Duché-Royaume clôt la cérémonie à laquelle une vingtaine de militants et sympathisants Normands participait sous le regard intrigué mais approbateur des boulistes. L'équipe de l’O.D.l.N., ainsi que les participants, espère voir un public chaque année plus nombreux et vous donne rendez-vous l’automne prochain.
Gilles LEFEVRE

IL Y A 1 080 ANS. HRÔLLFR GANGER FONDAIT LA DUCHÉ DE NORMANDIE

«GANGER HRôLFR" Jarl, fils de Jarl, aventurier, banni, toi qui a marqué pendant trois cents ans notre terre de Normandie.
HRôLFR, intrépide, ombrageux et querelleur, païen barbare, seigneur de ROUEN, premier Duc de Normandie, qui a pris cette terre pour la hisser au niveau des puissances qui défient l'histoire.
ROLF, toi qui nous a légué le fier nom de Normands.
Si beaucoup t'accusent d'avoir été un pillard, peu savent que tu as été mieux que cela.
À l’automne de l’an 911 le roi de Francs confirme la propriété de cette terre déjà Normande. C'est alors que se concrétise la lente imprégnation de deux cents ans où Celtes, Germains, Saxons, Francs, Vikings vont s'affirmer sous l’effet de ce révélateur Nordique qui caractérise si bien notre vieille nation.
Loin d'être un païen primaire, ou un pillard assoiffé d'or et de sang, ROLLON se révèle un puissant organisateur. Si il ne renie pas ses traditions, sa conversion au christianisme lui apporte le soutien de l'Église. L'audace scandinave, l’ordre chrétien, l’armature féodale irriguent le tissu social du premier État moderne européen.
Sa volonté avouée d'instaurer l'ordre Normand dans les pays réputés Normands, sa position d'arbitre et de gardien inflexible des lois incite les scandinaves à venir le rejoindre en Normandie pour participer â son entreprise.
Guerrier et connaisseur du prix des combats, il gére avec une fougue sourcilleuse la sécurité des biens et des personnes : à l'intérieur de la Duché de Normandie, la paix du Duc est une garantie de stabilité et de développement.
ROLLON réussit le pari de transformer une aventure en destin. Mais quel Destin, les Normands de ta Mer deviennent en vingt ans des Normands de la Terre : la Neustrie s'affirme Normande !
Cette Normandie si féconde qu'elle enverra ses fils conquérir des royaumes en Sicile, en Angleterre, en Orient, aux Canaries ...
ROLLON, le REÎTRE, le SOUDARD, a su comprendre que sans une assise large et solide, l'aventure Normande serait terminée cent cinquante ans avant HASTlNGS !
Honorer ROLLON flatte notre orgueil Mais son exemple est POLITIQUE, PRATIQUE et REALISTE.
ROLLON et ses compagnons ont conclu un marché avec l'histoire.
Leur adhésion au système carolingien est une formalité, ils ont gardé pour première religion leur confiance dans leur propre pouvoir.
De 911 a la mort de ROLLON en 932 cette première génération de Normands a su créer cet élan dont le dynamisme ne doit pas tarir.
Marins et guerriers n'ont jamais cessé d'être paysans et marchands, aimant gagner dans tous les sens du terme. Sages et fermes, les successeurs de ROLLON ne déméritent pas tant qu'ils défendent qu'ils sont avant tout Normands d'où qu'ils soient de Normandie.
Le destin, le génie des Normands ne sont jamais si grands que lorsque leurs chefs sont ambitieux pour leur peuple, leur nation.

ROUEN, jardins de SAINT OUEN,
le 21 septembre 1991,
Jean-François BOLLENS

Betterave …

à Bernard BLOIS (élu de l'Eure) qui a déclaré :
« Le MOUVEMENT BRETON a posé des bombes. Pas le MOUVEMENT NORMAND. Achetez des kalachnikovs ! »
Ce qui n'explique pas tout. Les élus bretons, dans leurs Conseils généraux, organisent des campagnes de promotion de l'identité bretonne. En Normandie, on a les élus que l'on peut, pas forcement ceux que l'on voudrait, mais certainement pas ceux qu'il nous faut. Cette réflexion prouve leur irrésolution.

L'Europe dans tous ses états

Estoniens, Lettons, Lituaniens, Scaniens, Shetlandais, Frisons, Croates, Bohémiens, Moraves, Flamands, Bretons, Alsaciens. Gaëls, Frioulans, nous vous aimons !

Par ce clin d'œil à nos amis que nous soutenons dans leur volonté de Renaissance, nous nous érigeons contre ce nouvel ordre mondial, non plus posé sur des bases culturelles traditionnelles et ancestrales, mais sur de nouveaux rapports, essentiellement axés sur des intérêts financiers, d'où émerge la nouvelle race dominante : le méga capitalisme.
Loin de réaliser un amalgame «militaro-américano-impérialisto-capitaliste, il devient urgent de tirer le signai d'alarme. Les nations, groupes ethniques, culturels ou cultuels sont vouées à une mort certaine et prochaine si elles ne se prennent pas en charge maintenant.
Dans un contexte d'effondrement des blocs (Est-Ouest, Nord-Sud…), nous assistons dans la partie que nous croyions la plus stable du monde – notre Europe – au réveil des nationalités. Ce mouvement, que la politique Bush a d'abord tenté d'étouffer, irradie dans toute l'Europe. Si les Baltes sont maintenant indépendants politiquement, qu'en sera-t-il des Arméniens, des Azéris, des Croates ? Certaines haines ancestrales ne risquent-elles pas de sortir de leur glaciation ? C'est le cas des Cypriotes, ou des minorités des Balkans. Peut-on imaginer que ce réveil s'étende jusqu'en Europe ? Des États de pacotille, telle la Belgique, risqueraient alors d'exploser. L'État français contemporain, hyper jacobin pourrait, lui aussi, être obligé de revisiter sa constitution imbécile.
Le propos n'est pas de trouver ici la panacée, ou de donner un « vade-mecum » de l'indépendance.
Si nous nous réjouissons de ce réveil des nationalités, nous déplorons le sang versé.
Désireux de contribuer à préserver le patrimoine européen, nous ne pouvons cependant pas faire irruption dans la « vie privée » des peuples. Si nous souhaitons la souveraineté des nations, il appartient à chacune d'elle – et à elle seule – de choisir sa voie : indépendance, autonomie, régionalisme, fédéralisme.
A chacun d'en décider souverainement.
Lev EFELERGIS.

Échos … logiques

Haie, bocage bosquet, futaie …
Le territoire français évolue très vite vers une division du paysage en deux types bien distincts : un espace forestier, dont la superficie ne cesse de s'étendre depuis près de deux siècles, et un espace campagnard sans arbre, à l'exception des vergers. Depuis 1960, on évalue à 640000 hectares les superficies de haies d'arbres épars et de bosquets (bois d'une surface inférieure à un demi-hectare) qui ont disparu de l'espace rural français. Ces petits boisements linéaires ou ponctuels, qui font le charme de la campagne, occupent encore plus d'un million d'hectares (1 100 000 ha). Si le phénomène devait se poursuivre au même rythme que ces dernières années, l’espace campagnard serait complètement déboisé dans une période estimée à 55 ans. Le plus étonnant demeure que la majeure partie de l'espace boisé ainsi détruit est récupérée pour la production agricole, laquelle, on le sait, est excédentaire en France !
« Terre Sauvage » n°54, septembre 1991.

Mais que croyez-vous que le Conseil Général de Seine-Maritime aura investi en 1990 pour assurer la sauvegarde de notre environnement ?
– 593 millions de francs, soit les 50% d'augmentation de budget d'investissement sur les routes départementales en cinq ans qui feront de la Seine-Maritime un carrefour européen. L'on préfère détruire notre espace forestier d'un côté, tandis que de l'autre on « encouragera » les cultivateurs à geler leurs terres. Un bel esprit de suite souffle sur nos assemblées ...
« Faire et défaire, c'est toujours travailler » dit-on.
C.Q.F.D. Car refaire sur des directives horzaines c'est encore et toujours uniformiser plus. Et lorsque nos campagnes Normandes ne se différencieront plus des autres paysages, nous aurons perdu un peu plus de notre « âme Normande » que traduisaient nos espaces.
Jean HALOT