On trouvera ici, pour l'heure, les textes de Runes-Lettres d'O.D.I.N.
qui, à terme, seront complètés des réflexions du groupe de
travail de l'O.D.I.N.-76, de sa création jusqu'à sa dissolution en 1996.



mercredi

Runes, Hiver 1992-93



Editorial

... du Comte de Paris


Il est actuel de disserter sur l'aliénation de la souveraineté nationale à des organismes allant des Hautes Autorités à quelque assemblée européenne, Atlantique ou mondiale. Certains se complaisent à ces perspectives, d'autres s'en irritent ou s'en offusquent (...) fréquemment (aussi) ces comportements tiennent soit au désir inavoué de faire résoudre par quelque instance supérieure les difficultés que ne peuvent plus affronter les États nationaux, soit au souci de défendre des intérêts particuliers menacés par les dispositions internationales nouvelles.

Aussi n'est- il pas superflu de creuser ce concept de souveraineté soit disant intégrale et intangible des nations ! N'est- elle pas déjà hypothéquée de cent manières avant même qu'on y porte atteinte par un contrat quelconque d'association. N'est- elle pas aliénée en fait ici et là, c'est- elle pas lésée dans de nombreux pays dont le nôtre, par la désagrégation de ses propres fondements ?

Si l'on entend par souveraineté nationale l'autorité suprême et sans contrôle de la nation sur elle-même, la libre capacité d'agir d'un État à l'intérieur de ses propres frontières, alors une mesure comme le Pool charbon-acier est révolutionnaire et crée une véritable solution de continuité historique.

Mais ne faudrait-il pas réviser cette conception formelle et juridique de la souveraineté à la lueur de l'évolution historique ? L'exercice de cette souveraineté ne doit- il pas nous préoccuper davantage que la souveraineté elle- même ?

La souveraineté nationale m'apparaît réelle et concrète seulement lorsque les conditions de son exercice sont remplies, c'est-à-dire lorsque dans un pays, les volontés de tous sont unies pour réaliser l'idéal moral, intellectuel et matériel que la notion c'est défini (...)

Si ces conditions n'existent pas, la souveraineté, même lorsqu'elle est fondée en Droit n'est plus qu'une coquille vide.

La souveraineté nationale repose donc autant que sur l'indépendance de droit à l'égard de autres nations, sur l'indépendance de fait et celle-ci tient à l'équilibre harmonieux et à l'exploitation de toutes les forces composant une nation en vue de la réalisation de son bien commun.

L'essentiel ne m'apparaît pas être la gravité des entorses légales à l'autorité suprême au profit de quelque organisme supranational, mais les atteintes insidieuses que font déjà peser sur la souveraineté la surpuissance des deux grandes nations antagonistes, aggravées par la désarticulation du pays.

Nous ne pouvons rien changer au fait que deux nations comptent 200 et 156 millions d'habitants, au fait que la seconde possède une capacité de production égale à la moitié de la production mondiale.

Nous pouvons par contre agir sur les conditions d'efficacité de notre souveraineté. La Suède, la Suisse, la Grande-Bretagne, vivent dans le même univers que la France, sont exposées aux mêmes tiraillements aux mêmes attractions, aux mêmes pressions, et pourtant ces pays qu'ils soient neutres ou associés à la politique atlantique, sauvegardent leur indépendance.

L'Histoire assigne à la France dans un délai réduit une mission et des obligations (...) La mission est d'inventer les formes de fusion ou de dépassement des souverainetés qui éviteront aux nations d'Europe l'absorption ou la colonisation ; l’obligation c'est de refaire rapidement la cohésion et l'unité du pays, de forger la volonté de vivre, car pour être à même de sacrifier tel fragment de souveraineté il faut d'abord la posséder toute entière.

Bulletin du 27 septembre 1952

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